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Chroniques des latrines du Château Blanc

La vie quotidienne des notables du Château Blanc et sa cité, racontée par la cigogne rieuse

 

Bonjour, je suis Hildegarde, la cigogne du Château Blanc. Cela fait des lustres que je tourne et retourne autour du vieux donjon du château. J’ai le bec et les plumes bien défraichis mais l’œil et l’ouïe sont toujours fins. Et j’ai vu et entendu bien des choses autour de ce donjon. Des choses bien cocasses. Laissez-moi vous les conter.

 

Les notables du Château Blanc

 

Nous sommes en l’an 21 des temps dits Modernes, dans le pays Ostrasien gouverné par le bon roi Ragobert. Le pays Ostrasien est divisé en Pagi. Château Blanc appartient au Pagus du Drache où croit régner sans partage le baron Strapontin. Dans l’ombre du Pagus guette depuis des temps immémoriaux, le gnome Magistron, grand faiseur de roitelets et à la solde des LaRrons en foire, secte très active dans les temps Pré-Modernes. Dans le Château du Pagus voisin régne le Comte Tear qui siége aussi au conseil du royaume.

 

Au Château Blanc règne Dame Pêcheur.

 

Dame Pêcheur a succédé au roitelet Glichon, chassé par sa populace lors de la dernière épidémie de peste postillonnante. Le chevalier Va-T-en-Guerre, bonhomme de chiffres, avait bien tenté de lui ravir la place, mais elle l’avait renvoyé à ses bouliers.

Dans les temps Pré-Modernes, dame Pêcheur, malgré son patronyme était piqueuse et laveuse de fondements de son état mais il lui restait un goût immodéré pour le poisson pas frais.

Dame Pêcheur répond au doux nom de Risette et est conseillé par Le Rieur, son chambellan, Le Maure, le Grand argentier, et dans l’ombre du cagibi, par le baron Strapontin et le gnome Magistron.  Des coursives du château montent des voix qui racontent que le gnome murmure, le baron chuchote et la dame ventriloque.

                                                            

Le tournoi châteaucratique

 

Le bon roi Ragobert faisait souvent grandes ripailles et forces libations et son jugement en sortait grandement affaibli. Un jour de grande bombance, le roi décide que les seigneurs de ses Pagi seront désormais désignés par la populace.  Depuis un tournoi de quolibets se tient toutes les soixante-douze lunes et la populace choisit comme seigneur celui ou celle qui lancera le meilleur quolibet. Le bon roi avait inventé la châteaucratie.

 

En l’an 20 des temps Modernes se tient donc le dernier tournoi de quolibets. En lice : le roitelet Glichon, tenant du titre, la Dame Pêcheur, LaRonne de la secte et le Chevalier Va-T-en-Guerre, joueur de boulier. Le tournoi se déroule sur fond de peste postillonnante qui éclaircit les loges des spectateurs.

 

Glichon, vieux briscard du quolibet, en a lancé tant et plus pendant les conseils du château qu’il s’essouffle à la première joute et donne dans le quolibet hargneux à la deuxième.

 

Va-T-en-Guerre donne dans le quolibet honnête qui ne semble pas amuser la populace. Il se retire à la deuxième joute.

 

Dame Pêcheur, tout en risettes, lance ses quolibets au ras des crottes de caniches qui semblent seoir à la populace et l’emporte finalement haut la main.

 

Depuis ce jour, Dame Pêcheur pérore et compte et recompte les ducats restés dans la cassette du Château Blanc à la recherche d’un trou abyssal.

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La carambouille du carrosse doré

 

Des centaines de lunes plus tôt, régnait sur le Château Blanc, Pierre le Chauve. Il était issu de la secte des LaRrons en foire et était, à l’époque conseillé par le gnome Magistron dont il avait fait son grand chambellan.

Pierre le Chauve, ou peut-être était-ce son prédécesseur Le Zorn, avait fondé la confrérie des Officiers de la Tour. Les Officiers de la Tour étaient chargés de faire venir les estrangers dans la cité et de réjouir les manants de passage. Le Maure était déjà là et officiait comme Grand argentier de la confrérie.

 

Les Officiers de la Tour, dépensent sans compter, voyagent jusqu’au pays du Soleil Levant, vident la cassette et achètent un carrosse doré pour promener les manants. Le Grand Argentier reste coi. Lorsque le roitelet Glichon gagne son premier tournoi de quolibets, le trou dans la cassette est abyssal. Les banquiers de la cité refusent d’abonder. Le roitelet Glichon confie alors au chevalier Le Faiseur et à ses écuyers, de retour des croisades, la tâche de redresser la barre et de boucher le trou dans la cassette. Cela prendra près de cent-vingt lunes. Vint-quatre lunes avant la fin du règne de Glichon, au grand conseil du royaume le sénéchal Le Nôtre étend les pouvoirs de la confrérie à plusieurs Pagi et la confrérie déménage au château du Comte Tear. Il reste un reliquat de dette dans la cassette, que nenni, la dette reste au Château Blanc. Heureusement le Carrosse Doré est entièrement payé. Il reste au Château Blanc et est confié à la nouvelle confrérie des Joyeux Lurons mené par le Chevalier Le Faiseur.

 

Fatigué et perclus de douleurs des suites de ses blessures reçues aux croisades, le chevalier Le Faiseur décide de se retirer en ses domaines au début de l’an 21 des Temps Modernes. Dame Pêcheur et le Grand argentier Le Maure en profitent pour réclamer le reliquat de dette à la nouvelle confrérie et refuse de laisser circuler le Carrosse Doré. La duplicité de Dame Pêcheur et la fourberie du Grand Argentier découragent les bonnes volontés et personne ne veut reprendre la confrérie, celle-ci est dissoute. Hélas, le Carrosse Doré est vendu au plus offrant. Les manants de passage sont bien dépités de devoir faire le tour de la cité à pédibus et jurent qu’on ne les y prendra plus.

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L’An de grâce 21 des Temps Modernes,

La Cigogne Rieuse

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